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Le droit naturel, en tant qu'''ordre'' régulateur et normatif, est accessible et se découvre grâce à un processus de connaissance naturelle, propre au caractère perfectible des être humains, ceci indépendamment des lois en vigueur, quel que soit le système législatif, ne dépendant d'aucune volonté particulière, politique ou coercitive. Le droit naturel ne s'identifie pas à l'arbitraire humain, même s'il peut être découvert malgré l'imperfection de la nature humaine. | Le droit naturel, en tant qu'''ordre'' régulateur et normatif, est accessible et se découvre grâce à un processus de connaissance naturelle, propre au caractère perfectible des être humains, ceci indépendamment des lois en vigueur, quel que soit le système législatif, ne dépendant d'aucune volonté particulière, politique ou coercitive. Le droit naturel ne s'identifie pas à l'arbitraire humain, même s'il peut être découvert malgré l'imperfection de la nature humaine. | ||
Dans un sens plus moderne, ce terme désigne la conception [[individualisme|individualiste]] et [[raison|rationnelle]] du [[droit]], défendue notamment par les [[ | Dans un sens plus moderne, ce terme désigne la conception [[individualisme|individualiste]] et [[raison|rationnelle]] du [[droit]], défendue notamment par les [[libertarianisme|libertariens]], découlant d'un minimum de droits « non négociables » à partir desquels est ouverte la possibilité de résoudre les conflits, objet principal de la [[justice]]. La plupart des théories libérales reposent également sur le [[Libéralisme#Les_droits_naturels|droit naturel]]. | ||
On parle de '''[[jusnaturalisme]]''' pour désigner toute théorie du droit naturel. | On parle de '''[[jusnaturalisme]]''' pour désigner toute théorie du droit naturel. | ||
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Au XXe siècle c’est l’explosion des « droits à ». Ainsi la Déclaration Universelle des Droits de l’homme, promulguée par les Nations Unies en 1948, donne une longue liste de droits dont l’homme est supposé disposer. Pour les libéraux, il s’agit de [[faux droits]], arbitraires, octroyés aux uns aux dépens des autres, alors que le droit naturel est universel par définition. Il est urgent de revenir aux Lumières et aux sources du droit naturel. | Au XXe siècle c’est l’explosion des « droits à ». Ainsi la Déclaration Universelle des Droits de l’homme, promulguée par les Nations Unies en 1948, donne une longue liste de droits dont l’homme est supposé disposer. Pour les libéraux, il s’agit de [[faux droits]], arbitraires, octroyés aux uns aux dépens des autres, alors que le droit naturel est universel par définition. Il est urgent de revenir aux Lumières et aux sources du droit naturel. | ||
==La conception contemporaine, | ==La conception contemporaine, libertarienne, du droit naturel== | ||
Le droit naturel, aussi bien dans sa première acception (religieuse) que dans les prolongements laïques qui l’ont suivi, s’est formé en opposition au droit positif, souvent arbitraire, injuste, voire tyrannique, et qui, l’histoire l’a suffisamment montré, n’est trop souvent que l’expression de la [[loi du plus fort]], en dépit de l’encadrement constitutionnel dans lequel on a pu l’enserrer. | Le droit naturel, aussi bien dans sa première acception (religieuse) que dans les prolongements laïques qui l’ont suivi, s’est formé en opposition au droit positif, souvent arbitraire, injuste, voire tyrannique, et qui, l’histoire l’a suffisamment montré, n’est trop souvent que l’expression de la [[loi du plus fort]], en dépit de l’encadrement constitutionnel dans lequel on a pu l’enserrer. | ||
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À la différence du droit positif, le droit naturel n’édicte que des normes négatives, car il s’agit uniquement pour chacun de respecter les droits de l’autre, donc de « ne pas faire » ce qui est illégitime. Ce n’est donc pas une collection précise de règles ou de lois comme en connaît le droit romain ou le droit français (Code civil, Code du commerce, Code pénal…), ni une jurisprudence comme en [[Common law]], mais simplement une « axiomatique normative » (selon [[Hans-Hermann Hoppe]] et [[François Guillaumat]]), un cadre juridique, destiné à entourer l’action de chaque individu et à permettre de régler les conflits possibles sur une base présumée commune à tous les hommes, la [[raison]]. Il n’est pas question d’aller dans le détail et de donner une liste explicite et exhaustive de [[règles]] en découlant et utilisables dans la vie quotidienne. | À la différence du droit positif, le droit naturel n’édicte que des normes négatives, car il s’agit uniquement pour chacun de respecter les droits de l’autre, donc de « ne pas faire » ce qui est illégitime. Ce n’est donc pas une collection précise de règles ou de lois comme en connaît le droit romain ou le droit français (Code civil, Code du commerce, Code pénal…), ni une jurisprudence comme en [[Common law]], mais simplement une « axiomatique normative » (selon [[Hans-Hermann Hoppe]] et [[François Guillaumat]]), un cadre juridique, destiné à entourer l’action de chaque individu et à permettre de régler les conflits possibles sur une base présumée commune à tous les hommes, la [[raison]]. Il n’est pas question d’aller dans le détail et de donner une liste explicite et exhaustive de [[règles]] en découlant et utilisables dans la vie quotidienne. | ||
[[Murray Rothbard|Rothbard]], avec son œuvre majeure, ''[[L'Éthique de la liberté]]'', pose le droit naturel comme fondation du [[ | [[Murray Rothbard|Rothbard]], avec son œuvre majeure, ''[[L'Éthique de la liberté]]'', pose le droit naturel comme fondation du [[libertarianisme]], en se situant dans le prolongement de la tradition réaliste aristotélicienne et thomiste. Pour lui, le droit naturel est déduit de la nature essentielle de l’homme (raison, conscience, capacité à opérer des choix). Vie, liberté, propriété, sont par nature sous le contrôle direct ou quasi-direct de la personne, ce sont des aspects d’elle-même, de sa nature. Cette « nature » est examinée de façon réaliste, comme sujet possible d’observation rationnelle et de réflexion, non comme un concept [[métaphysique]] ou religieux existant depuis toujours (nul besoin de présupposer une nature humaine intangible et invariante). | ||
Les droits individuels sont conformes à la nature de l'homme : l'homme est un animal social, certes, mais pas au point que sa vie n'ait de sens que dans et par la société, comme l'abeille dont la vie est inséparable de celle de la ruche. | Les droits individuels sont conformes à la nature de l'homme : l'homme est un animal social, certes, mais pas au point que sa vie n'ait de sens que dans et par la société, comme l'abeille dont la vie est inséparable de celle de la ruche. | ||
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* La notion de nature humaine : une critique fréquente portée sur le droit naturel est qu’il reposerait sur la croyance en une nature humaine préexistante, donnée une fois pour toutes. Or précisément le droit naturel moderne, par opposition au droit naturel classique dérivé de la théologie, n’affirme pas le caractère absolu d’une nature humaine dérivant de la Nature avec une majuscule (vision des Anciens) ou établie par Dieu (vision chrétienne du droit naturel). Il ne postule pas une "essence" de l'homme qui précèderait son existence. Il se contente, par une approche philosophique réaliste, de partir des caractéristiques humaines constatables pour établir le droit naturel, qui n’est pas une Idée platonicienne, mais fait l’objet d’une recherche rationnelle. Dire que la "nature" d'un homme diffère de la "nature" d'un animal ou d'un minéral exprime une évidence et n'implique pas qu'il existe une quelconque "essence" de l'homme. Le croyant peut souscrire au droit naturel moderne, conforme à ses convictions ; en revanche le droit naturel n’implique pas quelque croyance préalable que ce soit – mais il ne devrait pas non plus, en théorie, être en contradiction avec les préceptes qui fondent les différentes religions. | * La notion de nature humaine : une critique fréquente portée sur le droit naturel est qu’il reposerait sur la croyance en une nature humaine préexistante, donnée une fois pour toutes. Or précisément le droit naturel moderne, par opposition au droit naturel classique dérivé de la théologie, n’affirme pas le caractère absolu d’une nature humaine dérivant de la Nature avec une majuscule (vision des Anciens) ou établie par Dieu (vision chrétienne du droit naturel). Il ne postule pas une "essence" de l'homme qui précèderait son existence. Il se contente, par une approche philosophique réaliste, de partir des caractéristiques humaines constatables pour établir le droit naturel, qui n’est pas une Idée platonicienne, mais fait l’objet d’une recherche rationnelle. Dire que la "nature" d'un homme diffère de la "nature" d'un animal ou d'un minéral exprime une évidence et n'implique pas qu'il existe une quelconque "essence" de l'homme. Le croyant peut souscrire au droit naturel moderne, conforme à ses convictions ; en revanche le droit naturel n’implique pas quelque croyance préalable que ce soit – mais il ne devrait pas non plus, en théorie, être en contradiction avec les préceptes qui fondent les différentes religions. | ||
* Le droit naturel, réduit à une [[idéologie]] [[ | * Le droit naturel, réduit à une [[idéologie]] [[libertarianisme|libertarienne]] ou [[libéralisme|libérale]] : c’est la critique relativiste. Plutôt que d’idéologie, les libertariens préfèrent parler, à propos de leur conception du droit naturel, d’axiomatique normative : normative, car sa finalité est bien d’établir des normes de vie en société, des [[règles]] sociales ; axiomatique, car un tel droit se démontre à partir de concepts de base qui, eux, ne peuvent qu’être admis sans démonstration, car sans ces concepts (tels que [[liberté]], [[propriété]], [[responsabilité]]), aucune vie sociale n’est pensable. | ||
* Inversement, le droit naturel est souvent considéré comme un concept [[métaphysique]], ce qui est une autre façon de le "relativiser" : c'est le point de vue de [[Ludwig von Mises]] dans l'Action Humaine. L'[[axiome de non-agression]], l'[[éthique]] minimale libérale ou l'[[inaliénabilité de la volonté humaine]] aboutissent aux mêmes conséquences pratiques que le droit naturel et fournissent ainsi une façon d'échapper aux discussions métaphysiques sur ce concept que certains jugent dérivé de la [[religion]]. | * Inversement, le droit naturel est souvent considéré comme un concept [[métaphysique]], ce qui est une autre façon de le "relativiser" : c'est le point de vue de [[Ludwig von Mises]] dans l'Action Humaine. L'[[axiome de non-agression]], l'[[éthique]] minimale libérale ou l'[[inaliénabilité de la volonté humaine]] aboutissent aux mêmes conséquences pratiques que le droit naturel et fournissent ainsi une façon d'échapper aux discussions métaphysiques sur ce concept que certains jugent dérivé de la [[religion]]. | ||
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* {{guil|Le principe du droit naturel est le juste dans son unité, autrement dit, l’unité des idées du genre humain concernant les choses dont l’utilité ou la nécessité est commune à toute la nature humaine.}} [[Giambattista Vico]], ''Scienza nuova'' | * {{guil|Le principe du droit naturel est le juste dans son unité, autrement dit, l’unité des idées du genre humain concernant les choses dont l’utilité ou la nécessité est commune à toute la nature humaine.}} [[Giambattista Vico]], ''Scienza nuova'' | ||
* {{guil|Le droit naturel s'entend de deux manières. D'une part, il s'agit d'un produit de l'[[ordre spontané]], d'une loi naturelle qui se découvre par un processus de développement spontané du droit à la manière de la ''Common Law'' britannique. D'autre part, le droit naturel [[anarcho-capitalisme|anarcho-capitaliste]] réfère aussi à un ensemble de principes fondamentaux – des principes [[John Locke|lockéens]] chez [[Murray Rothbard|Rothbard]] – accessibles à la raison et sur la base desquels peut ensuite s'arranger le développement spontané des règles de droit. Autrement dit, le développement du droit relèverait de la jurisprudence des tribunaux privés qui découvriraient la loi et corrigeraient le droit coutumier à lumière des principes rationalistes du [[droit]] [[libertarien]]. De là, selon Rothbard, résulterait un « code de lois » dérivé à la fois du droit coutumier et de l'[[éthique]] rationaliste libertarienne.}} ([[Pierre Lemieux]], ''L'Anarcho-capitalisme'') | * {{guil|Le droit naturel s'entend de deux manières. D'une part, il s'agit d'un produit de l'[[ordre spontané]], d'une loi naturelle qui se découvre par un processus de développement spontané du droit à la manière de la ''Common Law'' britannique. D'autre part, le droit naturel [[anarcho-capitalisme|anarcho-capitaliste]] réfère aussi à un ensemble de principes fondamentaux – des principes [[John Locke|lockéens]] chez [[Murray Rothbard|Rothbard]] – accessibles à la raison et sur la base desquels peut ensuite s'arranger le développement spontané des règles de droit. Autrement dit, le développement du droit relèverait de la jurisprudence des tribunaux privés qui découvriraient la loi et corrigeraient le droit coutumier à lumière des principes rationalistes du [[droit]] [[libertarianisme|libertarien]]. De là, selon Rothbard, résulterait un « code de lois » dérivé à la fois du droit coutumier et de l'[[éthique]] rationaliste libertarienne.}} ([[Pierre Lemieux]], ''L'Anarcho-capitalisme'') | ||
* {{guil|Un "droit" est un principe moral qui définit et sanctionne la liberté qu'une personne a d'agir dans un contexte social. Il n'existe en ce sens qu'un Droit fondamental (tous les autres ne sont que ses conséquences ou ses corollaires) : le Droit d'un homme de posséder sa propre vie. (...) Ce qui signifie : le Droit de faire tout ce qui est nécessité par la nature d'un être rationnel pour le maintien, la promotion, l'accomplissement et la réussite de sa propre vie.}} ([[Ayn Rand]]) | * {{guil|Un "droit" est un principe moral qui définit et sanctionne la liberté qu'une personne a d'agir dans un contexte social. Il n'existe en ce sens qu'un Droit fondamental (tous les autres ne sont que ses conséquences ou ses corollaires) : le Droit d'un homme de posséder sa propre vie. (...) Ce qui signifie : le Droit de faire tout ce qui est nécessité par la nature d'un être rationnel pour le maintien, la promotion, l'accomplissement et la réussite de sa propre vie.}} ([[Ayn Rand]]) |
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